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Témoignage "J'étais prêt à vendre mon corps" : comment le Covid-19 a plongé Magyd dans la précarité

Le 26e rapport de la Fondation Abbé Pierre, publié lundi, alerte sur le risque que la crise du Covid-19 et ses conséquences économiques fait peser sur les plus fragiles. Certains d’entre eux, comme Magyd, se sont retrouvés brutalement noyés sous les dettes.

Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Travailleur social en Seine-Saint-Denis, Magyd a perdu son emploi en octobre en pleine crise sanitaire. Il a retrouvé un travail depuis mais peine toujours à remonter la pente. (TOUS DROITS RÉSERVÉS)

Pour rentrer chez lui à Livry-Gargan après ses maraudes nocturnes, Magyd, travailleur social en Seine-Saint-Denis, s’est endetté pour acheter une voiture. Les problèmes sont arrivés quand il a perdu son emploi en octobre dernier.

Publié mardi 2 février, le 26e rapport de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement en France alerte ainsi sur les effets de la crise sanitaire du coronavirus Covid-19, qui affecte les plus fragiles. Les mal-logés, les SDF. Et, aussi, certains qui, comme Magyd, ont brutalement basculé dans la précarité et sont tombés dans l’engrenage des impayés de loyer, accéléré par le chômage galopant dû à la récession.

Au chômage, il doit vivre avec 435 euros

"J'avais un salaire qui était à peu près de 1 400 - 1 500 euros, explique-t-il. Je me suis retrouvé avec 435 euros de chômage. J'avais un loyer de 740 euros, et même si je donnais tout ce que me donnait Pôle emploi, je n'avais pas de quoi payer mon loyer. Et au mois de janvier, malchance encore, j'ai eu ma régularisation de facture d'eau, la taxe d'ordures ménagères. Aujourd'hui, j'en suis à 4 000 euros d'impayés."

Ça faisait quatre ans que j'étais dans cet appartement et je n'ai jamais eu de problèmes. Se retrouver au bout du deuxième mois avec un courrier d'huissier et une assignation au tribunal, cela a été très dur.

Magyd

à franceinfo

Cette dette ronge le célibataire de 28 ans. En janvier, il retrouve un CDI dans le social payé 1 500 euros, mais ne s'en sort toujours pas. Il cherche en vain un deuxième emploi, et pense au pire. "J'étais prêt à vendre mon corps, soupire-t-il. Et je crois que davantage que cela, on ne peut pas."

J'ai commencé à vendre tout ce qu'il y avait dans mon appartement : téléviseur, ameublement, gel douche, tout ce qui était neuf et inutilisé. J'ai tout mis en vente. Ça a été brutal.

Magyd

à franceinfo

"En quelques mois, poursuit Magyd, vous vous retrouvez à ne plus manger, à ne plus vous soigner. Tout est dans l'incertitude : vous ne pouvez pas vous projeter, vous imaginez qu'à tout moment on peut vous sortir du logement. On est dans une peur constante."

"Vous avez honte"

Il a connu les poussées d'eczéma, dues à l'angoisse et au stress. "J'étais en dépression, conclut Magyd. Vous avez honte : au début, je n'osais pas dire à mes collègues que je n'arrivais pas à me nourrir correctement. C'est difficile parce que vous aidez ce public-là mais vous vous retrouvez à votre tour dans ce cas-là. C'est quelque chose qui est difficile à dire." 

Magyd compte aujourd'hui sur l'aide de la Fondation Abbé Pierre. Son dossier vient de passer en commission. Comme lui, des milliers de ménages pourraient perdre leur logement, selon la Fondation Abbé Pierre. Parmi eux, des auto-entrepreneurs, des artisans, des aides à domicile, des intérimaires dans la restauration ou le bâtiment.

Magyd bascule dans la précarité, fragilisé par les conséquences économique du Covid-19 - Sandrine Etoa-Endegue

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