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"Ma mère est piégée dans un espèce de bunker ": une plainte déposée contre un Ehpad où de nombreux résidents sont morts du Covid-19

Alors que les plaintes se multiplient contre les Ehpad, la fille d’une résidente d’un établissement de la capitale a déposé une plainte pour "mise en danger de la vie d’autrui". Selon un bilan provisoire, entre 14 et 22 résidents sur 65 y sont morts du coronavirus. La direction assure, elle, avoir pris toutes les mesures nécessaires dès le début de la crise.

Article rédigé par Gaële Joly
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
L'entrée de l'Ehpad Parentèles, dans le 9e arrondissement de Paris. (GOOGLE STREET VIEW)

Les plaintes se multiplient en France contre les Ehpad. Rien qu’à Paris, le parquet en a déjà collecté 26 qui visent des personnes ou organismes qui gèrent la crise sanitaire, dont les Ehpad. Parmi les dernières en date, cette plainte pour mise en danger de la vie d’autrui, la semaine dernière, de la fille d’une résidente des Parentèles, un établissement du 9e arrondissement de Paris, spécialisé dans l'accueil de personnes atteintes d'Alzheimer. Selon un bilan provisoire, entre 14 et 22 résidents sur 65 sont morts du coronavirus Covid-19. La direction, elle, refuse de parler d’erreur.

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C’est pour briser l’omerta, assure-t-elle, que Marie-Sophie Boulanger a fini par porter plainte : dans l’Ehpad ou vit sa mère âgé de 87 ans, le coronavirus a fait des ravages, mais la direction est restée trop longtemps silencieuse. C’est, dit-elle, une hécatombe que l’on cache aux familles. "J’ai l’impression que ma mère est piégée dans un espèce de bunker, explique-t-elle. Rien ne sort, rien ne rentre, on ne sait pas ce qui se passe."

Je veux absolument maintenir le contact, parce que j’ai un peu abandonné l’idée d’arriver à la sauver. Je ne peux pas la sortir mais je voudrais au moins qu’elle sache qu’on pense à elle, qu’elle ne meure pas abandonnée, tout seule.

Marie-Sophie Boulanger

à franceinfo

Récemment la direction de l'Ephpad a communiqué sur 14 décès liés au Covid-19, mais pour l’infirmière coordinatrice, le bilan est bien plus lourd : 22 morts et 8 des 20 soignants contaminés. Elle a fini par démissionner le 10 mars dernier. L'épidemie est alors au niveau 2, et on lui a refusé l’isolement de certains patients, porteurs de symptômes. À cette date, les Ehpad avaient déjà fermé leurs portes depuis une semaine. 

"Le virus s’est propagé sans entraves"

"Moi j’avais dit que [ces patients], je les isole à leur étage, ils ne vont pas aux activités pour le moment, explique l'infirmière démissionnaire. Effectivement, ils ont été isolés. Le lendemain, on a enlevé l’isolement et puis en fin de journée, une des personnes de l’étage s’est retrouvée avec un 39,2°C de température, et puis voilà... Une des premières résidentes Covid est partie de cet étage-là." "Le virus s’est propagé sans entraves, poursuit-elle. Il n’y a pas eu une action de mise en place pour limiter la casse."

J’ai démissionné le 10 mars mais très sincèrement, j’étais très mal quand mes collègues m’annonçaient les décès, les décès, les décès...

L'ancienne infirmière coordinatrice

à franceinfo

Cette infirmière coordinatrice avait d’ailleurs envoyé aux familles un courrier, dont nous avons eu la copie, pour expliquer son départ. "Je tiens, écrivait-elle, à ce que chacun de vous comprenne que je n’ai jamais abandonné vos proches mais que moralement, il m’était impossible d’assumer les choix faits par la direction en place."

Dans un mail, la direction nous assure pourtant que depuis le début de la crise "l’ensemble des mesures ont été prises, conformément aux règles légales et réglementaires en vigueur, dans un souci constant de préserver les résidents, leurs familles et nos équipes, et leur sécurité. Une information transparente et constante est légitimement communiquée aux proches des résidents, et de manière individuelle pour ceux qui nous interrogent". La direction de l'Ehpad précise qu’elle réserve désormais ses réponses aux enquêteurs.

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