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Le gouvernement français est-il champion de la censure sur Twitter ?

L'eurodéputé et vice-président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a affirmé que 80% des demandes de retrait de tweets dans le monde provenaient du gouvernement français en 2016.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le logo de la plateforme Twitter (illustration). (JAAP ARRIENS / NURPHOTO)

Invité sur LCI dimanche 16 février, l’eurodéputé du RN Jordan Bardella a pointé du doigt les "dérives" du gouvernement "à l’égard de la liberté d’expression". Il a affirmé qu’"en 2016, 80% des demandes de retrait de tweets dans le monde venaient du gouvernement français", voyant là un exemple flagrant de censure sur internet. La Cellule Vrai du Faux vous explique pourquoi sa démonstration est infondée.

La France représente moins de 2% des demandes

Selon les dernières données officielles (en anglais) publiées par Twitter, on dénombrait 347 demandes de retrait légales en France au premier semestre 2019, sur un total de 17 510. La France représente donc moins de 2% du total mondial des requêtes de ce genre, bien loin des chiffres avancés par l'eurodéputé.

La seule fois où l’on s’approche de la situation décrite par Jordan Bardella, c’est au second semestre de 2013, période lors de laquelle la France a compté pour 87% des demandes de suppressions de tweets dans le monde. Le pays était alors à la première place. Mais à cette époque, Twitter n’avait pas la même taille qu’aujourd’hui et le nombre de demandes légales françaises était bien faible au niveau mondial : 353 ! Et seulement 25 pays étaient comptabilisés.

L'année 2016, évoquée par Jordan Bardella, n'est pas particulièrement marquante : la France ne représentait alors que 19% du total mondial des requêtes, avec 1 800 demandes.

La Turquie en tête, suivie par la Russie

Par ailleurs, si on observe l’évolution des chiffres depuis 2013, ce sont la Turquie et la Russie qui envoient le plus de requêtes de ce type à Twitter. Quant à la Chine, mentionnée par le député européen, impossible de connaître la réalité des chiffres car le réseau social y est tout simplement interdit.

Toute demande ne provient pas forcément du gouvernement

L'eurodéputé ne mentionne que le gouvernement, or les requêtes pour supprimer un contenu peuvent aussi émaner des forces de l'ordre, d'avocats ou d'organisations partenaires qui luttent contre les discriminations. Elles peuvent aussi découler de décisions de justice. Twitter cite plusieurs exemples de contenu retiré au cours des dernières années, notamment des tweets haineux à l'encontre de Bilal Hassani, la star française de l’eurovision 2019. En mai de la même année, une association avait demandé et obtenu la suppression d'un tweet homophobe contre les deux otages français au Bénin.

Twitter est loin d’approuver toutes les demandes de retrait

Quand bien même le nombre de requêtes légales serait important, la plateforme n’accepte pas toujours de supprimer le contenu visé. On observe d'ailleurs que le taux d'approbation de Twitter est relativement faible pour la France : 9% sur les six premiers mois de 2019. Pour chaque demande, Twitter vérifie la conformité des tweets avec ses conditions d’utilisation. 

À partir de là, deux possibilités de sanction : soit la plateforme juge un tweet contraire à ses conditions d’utilisation et elle peut aller jusqu’à la suppression du contenu ; soit elle juge le contenu contraire seulement à la législation d’un pays en particulier, alors il pourra être "restreint", c’est-à-dire inaccessible aux utilisateurs dans le pays où la loi a été enfreinte.

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