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Espagne : de la chute à la découverte du corps sans vie, 12 jours de recherches pour tenter de sauver le petit Julen

Les autorités ont annoncé la découverte, dans la nuit de vendredi à samedi, du corps de Julen Rosello, un garçonnet âgé de 2 ans, au fond d'un puits de Totalan (Andalousie, Espagne). Retour sur une opération de secours qui a ému toute l'Espagne. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des opérations de secours pour tenter de sauver le petit Julen Rosello, 2 ans, le 25 janvier 2019 à Totalan, en Andalousie (Espagne).  (DANIEL PEREZ / DPA / AFP)

La fin tragique d'une opération sans précédent. Après douze jours de recherches, le corps sans vie du petit Julen Rosello, 2 ans, a été retrouvé dans la nuit du vendredi 25 au samedi 26 janvier, dans un puits de Totalan (Andalousie, Espagne) où il était tombé le 13 janvier, ont annoncé les autorités. 

"Malheureusement à 1h25 du matin , les équipes de sauvetage sont parvenues au niveau du puits où l'on recherchait Julen et ont localisé le corps sans vie du petit", a annoncé sur Twitter le préfet d'Andalousie, Alfonso Gomez de Celis, tout en présentant ses "condoléances" à la famille.

"Toute l'Espagne s'unit à la tristesse infinie de la famille de Julen. Nous avons suivi de près chaque étape pour arriver jusqu'à lui. Nous remercierons pour toujours l'effort infatigable de ceux qui l'ont cherché durant tous ces jours", a également réagi Pedro Sanchez, le chef du gouvernement, sur le réseau social. Le roi d'Espagne, Felipe VI, a quant à lui fait part de sa "douleur la plus profonde", et adressé ses "plus sincères condoléances à la famille"

Une enquête a été ouverte pour tenter de faire la lumière sur les circonstances de ce drame. Récit de douze jours qui ont particulièrement marqué l'Espagne.

Une chute dans un puits non signalisé

Selon ses parents, Julen Rosello est tombé par accident dans un puits abandonné de 25 centimètres de diamètre et de plus de 100 mètres de profondeur, le 13 janvier dernier.

D'après ses proches, l'enfant a chuté dans ce puits alors qu'il jouait autour, sur un terrain appartenant à un membre de sa famille. Ses parents déjeunaient non loin de là, dans les collines de Totalan, un village d'une centaine d'habitants proche de Malaga (Andalousie, Espagne).

Ce puits n'était pas signalé et n'était pas protégé. Il avait été creusé sans autorisation, d'après les autorités.

L'émotion d'un pays alors que débutent les recherches

Très vite, de premières opérations de secours sont lancées. La situation est inédite. L'opération, d'une ampleur exceptionnelle, mobilise plusieurs centaines de secouristes, dont le travail est scruté par une foule de journalistes. Le début des recherches tient le pays en haleine. 

Dans un premier temps, les secouristes introduisent une caméra dans le puits, dans l'espoir de retrouver rapidement l'enfant. Mais le matériel ne peut aller au-delà de 70 mètres de profondeur : un amas de pierres, situé à 71 mètres sous terre, bloque toute tentative de descendre plus bas. Le petit Julen pourrait être sous cet amas, et avoir entraîné ces pierres dans sa chute. Les secours tentent de les retirer par un procédé d'évacuation, explique à la presse Angel Vidal, un ingénieur impliqué dans l'opération. En vain. 

Le 16 janvier, trois jours après l'accident, des secouristes retrouvent des cheveux de l'enfant, annoncent les autorités. Pour la première fois, les proches de Julen ont la preuve qu'il se trouve bien dans ce puits. "Il y a un espoir de vie, mais il diminue à chaque minute qui passe", alerte Miguel Ángel Escaño, le maire de Totalan.

On voit un peu de lumière. Nous nous sentons morts, mais avec l'espoir d'avoir un ange qui nous aide à le sortir vivant. On dirait que ça dure depuis des mois.

le père de Julen

à la presse, le 16 janvier

L'histoire touche particulièrement les Espagnols, et les médias continuent de suivre en direct le déroulé des opérations. Le pays s'émeut d'apprendre que les parents de Julen ont déjà perdu, en 2017, un enfant de 3 ans souffrant d'un problème cardiaque. Dans le village de Totalan, une centaine d'habitants marchent en soutien à la famille de Julen, rapporte El Pais (article en espagnol)

Les parents de l'enfant sont, ce même jour, soutenus par un homme bien connu des Espagnols : Juan José Cortés, le père de Mari Luz, une petite fille de 5 ans assassinée en 2008 à Huelva (Espagne). "Qu'ils ne perdent pas espoir", leur lance-t-il. Il devient ensuite leur porte-parole. 

Une opération qui se complique

Dans l'incapacité d'aspirer les pierres bouchant le puits à 70 mètres, les secouristes se lancent dans une nouvelle opération, pour le moins délicate. Il s'agit de creuser un tunnel vertical, parallèle au puits. Mais la galerie "présente des difficultés techniques, fondamentalement à cause de l'instabilité du terrain et de sa dureté", explique à la presse l'ingénieur Angel Vidal.

Nous faisons tous les efforts possibles pour que le délai soit le plus court possible, mais je veux souligner que les difficultés sont énormes et tous les travaux se font sans connaissance préalable du terrain.

Angel Vidal, ingénieur impliqué dans les opérations de secours

à la presse

Plusieurs centaines de techniciens, gardes civils et pompiers continuent de se relayer sur le terrain. Neuf entreprises – publiques comme privées – participent aux recherches. Parmi elles, Stockholm Precision Tools AB, une société suédoise qui a contribué, en 2010, au sauvetage de 33 mineurs chiliens coincés durant 69 jours sous terre. 

Les difficultés se multiplient les jours suivants. Le 20 janvier, à 40 mètres de profondeur, le tunnelier se heurte à une couche de roches dures, ralentissant sa progression. "On a rencontré cinq mètres de granit", alerte Juanma Moreno, le président de la région d'Andalousie. Le lendemain, la machine arrive à 52 mètres de profondeur. "Il faut se rendre compte que nous réalisons en quelques jours une opération qui prend habituellement des mois, sans aucune étude géologique", relève Juan López-Escobar, représentant du Corps des ingénieurs des mines sur place.

Nouvelle difficulté le 22 janvier. Les tubes qui doivent sécuriser les parois du tunnel parallèle au puits sont trop larges. La cavité doit "être de nouveau perforée à une dimension plus importante", reconnaît le porte-parole de la sous-préfecture de Malaga. C'est chose faite le lendemain. "Les personnes qui travaillent là-bas et mettent leur vie en jeu ont l'espoir de retrouver l'enfant vivant, déclare Bernardo Molto, porte-parole de la Garde civile dans la province de Malaga. Dans le cas contraire, ils ne travailleraient pas dans ces conditions."

Le tunnel de la dernière chance

Le 24 janvier, il reste une dernière étape avant d'atteindre l'enfant : il faut désormais finir de construire un tunnel horizontal entre le premier tunnel et le puits, afin d'arriver à l'endroit où Julen est censé se trouver. L'opération est elle aussi particulièrement complexe et périlleuse : ce tunnel doit être creusé dans une direction oblique, à même la montagne.

Huit mineurs d'élite, venus spécialement de la région minière des Asturies, dans le nord-ouest du pays, commencent à creuser avec une énorme perceuse une galerie de près de quatre mètres. Ils descendent dans le tunnel avec des bouteilles d'oxygène et par équipe de deux, grâce à une sorte de cage métallique. Des pompiers et une équipe d'artificiers de la Garde civile contribuent également à cette dernière ligne droite. Car face à la dureté de la roche, les artificiers n'ont d'autre choix que de procéder à quatre explosions contrôlées pour atteindre Julen. 

Vendredi, les secouristes étaient à un moins d'un mètre du puits où se trouvait le garçon. Ils ont finalement atteint la galerie et retrouvé l'enfant, mort, au milieu de la nuit. 

D'après les premiers éléments de l'enquête, cités par Alfonso Gomez de Celis, l'enfant de 2 ans a fait une "chute libre de 71 mètres", avant de s'arrêter sur un amas de terre. L'autopsie du corps pourrait permettre, notamment, de déterminer si Julen est mort sur le coup.

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