Elle avait à peine 18 ans lorsqu'elle est entrée dans le maquis en 1973. Joïce Mujuru est une ancienne combattante de la guerre d’indépendance du Zimbabwe contre le gouvernement raciste de Ian Smith. Son surnom de maquis, Teurai Ropa (celle qui fait couler le sang). Elle s'était fait connaître en 1974 en abattant un hélicoptère des forces armées rhodésiennes. Son mari, un ancien compagnon d’armes du président Mugabe, est décédé en 2011 dans un mystérieux incendie de leur maison, peu après avoir réclamé le départ à la retraite de Robert Mugabe. Le communiqué annonçant sa disgrâce est tombé le 9 décembre 2014 : «Le président a exercé ses pouvoirs exécutifs pour libérer l’honorable Joïce Mujuru de son poste avec effet immédiat», écrit le secrétaire général du gouvernement.Joïce Mukuru est accusée pêle-mêle d’incompétence, de corruption et de complot pour assassiner le père de l’indépendance du pays. Exclue du parti présidentiel, elle a toujours nié toutes les allégations de trahison et de corruption portées contre elle. Joïce Mujuru et Robert Mugabe, le 24 octobre 2014 à Harare, deux mois avant d'être limogée. (Photo AFP/Jekesai Nijikizama) Non à la violence et à l'intolérance politiqueAprès avoir gardé le silence pendant huit mois, Joïce Mujuru ne cache plus ses ambitions politiques. Elle a décidé de défier ouvertement celui qui, à 91 ans, brigue à nouveau un ultime mandat à la tête du Zimbabwe. Robert Mugabe a été désigné candidat de son parti pour la présidentielle de 2018. «Nous disons non à la violence ! Nous disons non à l’intolérance politique. Ensemble, nous pouvons transformer le Zimbabwe en un Etat démocratique», assure l’ancienne vice-présidente. Dans son projet politique, elle énumère plusieurs mesures qui s’opposent frontalement à son ancien chef.Oui à la révision de la réforme agraireJoïce Mujuru promet de revoir toutes les lois d’indigénisation chères à Robert Mugabe. Ces lois exigent que la majorité des parts des entreprises soient détenues par des Zimbabwéens. «Nous devrons renforcer, promouvoir et respecter le droit à la propriété privée», écrit Joïce Mujuru. Elle s’engage à résoudre le problème des expropriations décidées par le régime de Robert Mugabe dans les années 2000. Une réforme agraire brutale qui a conduit à l’expropriation de quelque 4000 fermiers blancs, souvent au bénéfice de proches du pouvoir : «Les nouveaux propriétaires ont souvent été incapables de poursuivre l’exploitation, faute de compétences et de capital pour s’équiper, brisant un secteur-clé de l’économie», regrette Joïce Mujuru qui rappelle que son pays fut dans le passé le grenier à céréales de l’Afrique australe. La première dame du Zimbabwe, Grâce Mugabe, au côté de son mari, le 12 avril 2012 à Harare. Elle est entrée dans le jeu politique en accusant sa rivale, Joïce Mujuru, de complot contre le président. (Photo Reuters) Pas un mot pour Grâce MugabeA 59 ans, Joïce Mujuru s’apprêterait à lancer sa propre formation politique, selon ses proches. Objectif: affronter Robert Mugabe à l’élection présidentielle de 2018 et le battre dans les urnes. Pas un mot en revanche à l’intention de Grâce Mugabe, l’épouse du président, entrée récemment dans le jeu politique en l'accusant de complot contre son mari. A la surprise générale, elle a été désignée en décembre 2014 pour conduire la puissante organisation des femmes du parti présidentiel. Devenant ainsi une prétendante sérieuse à la succession. Et une adversaire acharnée de Joïce Mujuru.