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La Tunisie, championne africaine des produits bio

L’agriculture biologique tunisienne est en plein essor. En 2018, les exportations ont nettement augmenté. Produits phare : l’huile d’olive et les dattes. 

Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Récolte d'olives bio à Mormag à côté de Tunis, en novembre 2015.  (FETHI BELAID / AFP)

Les produits bio joueraient un rôle important dans la balance commerciale de la Tunisie. Selon des chiffres officiels, "le secteur des produits bio a contribué à hauteur de 9,3% dans le total des exportations tunisiennes" en 2016. Entre janvier et octobre 2018, les ventes de ces produits à l’étranger, favorisées notamment par une forte demande dans les pays européens, auraient ainsi rapporté 520 millions de dinars, soit environ 153 millions d’euros, à un moment où l’économie du pays est en crise.

Profitant de l’équivalence de sa certification avec celle de l’UE, la Tunisie serait aujourd’hui le premier exportateur africain du secteur. Sur le continent, elle "est championne en terme de superficies" en matière d’agriculture bio, 306 000 ha lui sont consacrés. 

Principaux produits exportés : l’huile d’olive (42 000 tonnes pour les dix premiers mois de 2018, selon des données citées par le site webmanagercenter) et les dattes (10 473 tonnes, selon la même source), en l’occurrence les fameuses Deglet Nour venues du sud du pays. Autres produits (on en compterait en tout une soixantaine) : l’orange maltaise, la harissa, la farine bsissa (mélange de blé, pois chiches, graines de fenouil, cumin), les plantes aromatiques…

Et le marché local ?

Si les produits bio s’exportent bien, ils se vendent mal sur le marché local. "Le bio manque fortement de visibilité en Tunisie, la communication se faisant essentiellement sur les réseaux sociaux", constatait le site middleeasteye en 2015. De plus, les consommateurs locaux "ne distinguent encore pas bien entre un produit ayant obtenu la certification 'bio' et un produit 'naturel' qu’ils achèteraient au marché, mais qui aurait peut-être été obtenu à l’aide de pesticides"… Dans le même temps, le marché tunisien souffrirait d’une absence de politique nationale pour développer le secteur et aider les producteurs.

Désert, chameaux et plages…

Le potentiel est donc là. Mais le secteur "accuse un déficit en matière de promotion de ses produits et de son savoir-faire sur le marché bio mondial", observait l’ambassadeur suisse à Tunis lors d’un débat le 5 avril 2019 devant un public de professionnels tunisiens du bio, selon un compte-rendu de webmanagercenter. Chez certains Suisses, "la Tunisie est toujours associée à l’image du désert, des chameaux et des plages. Parmi les produits bio que vous commercialisez, on ne connaît pratiquement que l’huile d’olive et les dattes. Un effort en marketing est nécessaire pour améliorer le positionnement de la Tunisie sur le marché bio mondial", a renchéri un consultant.

Récolte d'olives dans le village de Sabalet Ben Ammar, près de Tunis, le 10 octobre 2016. (HAMMI/SIPA)

Réponse du président de la chambre syndicale des exportateurs d’huile d’olive : "L’image folklorique des chameaux et des plages est une fierté pour les Tunisiens, mais elle ne traduit aucunement le présent du pays qui enregistre des avancées énormes notamment en matière d’agriculture biologique"

Problèmes dans certaines huiles

Des "avancées", précisément, devraient cependant être accomplies en matière d’amélioration de la qualité. En mars 2018, une enquête du journal 60 Millions révélait ainsi que sur les huiles d’olive testées, "cinq produits contiennent des résidus de pesticides et six des plastifiants, notamment des phtalates, reconnus comme perturbateurs endocriniens. Cette migration, qui touche surtout des huiles de Tunisie, peut provenir des contenants ou des joints de machines utilisés sur la chaîne de production. On trouve également du toluène et des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dans plusieurs échantillons". De quoi faire peur…

Selon une responsable du ministère tunisien de l’Agriculture citée par Jeune Afrique, ce ne sont pas les huiles d’olive qui sont incriminées en tant que telles, mais les récipients qui les contiennent. "Le phtalate, composé chimique plastifiant qui favoriserait la malformation fœtale et l’infertilité, pointé du doigt par l’étude, aurait migré des bouteilles aux huiles d’olive. Or, l’article (de 60 Millions) n’indique pas si le conditionnement s’est effectué en Tunisie ou non." Affaire à suivre.

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