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Six mois après la victoire, la gauche en pleine tempête

Gestion ratée de Florange, mauvais résulats aux législatives partielles... Les nuages s'amoncellent au-dessus de François Hollande et de son gouvernement. Autopsie d'un malaise.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
François Hollande et Jean-Marc Ayrault, le 19 novembre 2012 à Paris. (PHILIPPE WOJAZER / AFP)

POLITIQUE - Des sondages toujours aussi mauvais, une première sanction dans les urnes, une majorité de plus en plus fragile... Après seulement six mois de pouvoir, les nuages s'amoncellent au-dessus de François Hollande et de son gouvernement. Autopsie d'un malaise.

François Hollande n'endosse pas le costume du chef

La gestion ratée du dossier de l'usine ArcelorMittal de Florange a mis en lumière les difficultés de l'exécutif pour trouver un mode de fonctionnement efficace et lisible. Alors qu'il contraint Mittal à ne licencier aucun salarié, l'accord conclu entre Matignon et l'industriel indien a été perçu comme une capitulation.

La stratégie de François Hollande est en grande partie responsable de ce fiasco de communication. Il a laissé Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, échafauder l'hypothèse d'une reprise du site via une nationalisation temporaire, alors qu'il n'ignorait pas que Jean-Marc Ayrault y était très hostile. Jusqu'au bout, le chef de l'Etat aura encouragé les deux hommes dans leur ligne respective. Pour finalement trancher en faveur du Premier ministre, douchant brutalement les espoirs des salariés.

Au-delà de son autorité, c'est l'habileté politique de François Hollande qui devient sujette à caution. Alors que ses ministres multiplient les couacs depuis début juin, la technique du "culbuto", consistant à donner des signes contradictoires pour ménager tous ses interlocuteurs, paraît avoir atteint ses limites au moment où la majorité se cherche un cap.

Une majorité en voie de délitement

Depuis le début du quinquennat, les parlementaires du Front de gauche s'éloignent chaque jour un peu plus de la majorité. Cet automne, les sénateurs ont mis en échec plusieurs textes du gouvernement. Comme eux, les députés communistes se sont abstenus lors du vote du budget 2013.

A la fronde des communistes s'ajoute celle des écologistes, qui ne manquent pas une occasion (traité budgétaire européen, EPR, Notre-Dame-des-Landes...) de critiquer les orientations de l'exécutif, tout en conservant deux portefeuilles ministériels. Mardi, les députés Europe Ecologie-Les Verts n'ont pas tous voté pour le budget rectificatif à l'Assemblée. Ce texte est particulièrement emblématique puisqu'il contient le crédit d'impôt pour les entreprises, principale mesure du pacte de compétitivité présenté début novembre par Jean-Marc Ayrault après la remise du rapport Gallois.

Pour ajouter à la confusion, une partie des députés PS continue à soutenir ouvertement Arnaud Montebourg et une nationalisation de Florange, bien que Matignon ait déjà tranché. Ils ont signé il y a quelques jours une tribune en ce sens, sur le site du Nouvel Obs.

Le gouvernement lui-même a du mal à conserver sa cohésion, comme l'a montré le dossier Florange. A Bercy, la cohabitation de sept ministres crée de multiples tensions. Les deux plus en vue jusqu'à présent se retrouvent subitement dans la tourmente : Arnaud Montebourg désavoué sur Florange, et Jérôme Cahuzac, accusé par Mediapart d'avoir détenu un compte en Suisse. Leur ministre de tutelle, Pierre Moscovici, peine à se rendre audible, comme l'écrit Le Monde (article payant), à une période où, pourtant, les questions économiques n'ont jamais été aussi cruciales.

La gauche devant un dilemme idéologique

Dans ce contexte, comment peut rebondir la gauche ? Après les mauvais résultats, dimanche, du premier tour des trois élections législatives partielles, les socialistes tentent de reprendre la main en s'emparant des questions sociétales. Le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a annoncé lundi le lancement d'une pétition en faveur du mariage des homosexuels.

De leur côté, les députés PS ont décidé de passer à l'offensive sur la question du droit de vote des étrangers aux élections municipales. Alors que François Hollande avait enterré à demi-mot la réforme lors de sa conférence de presse en novembre, le groupe PS à l'Assemblée appelle officiellement le gouvernement à déposer un projet de loi avant de rechercher la majorité de 3/5es des parlementaires, nécessaire à l'adoption de cette mesure.

Cette stratégie fait débat chez les socialistes. Les questions sociétales peuvent-elles vraiment remobiliser un électorat populaire avant tout victime de la crise économique ? Pour le député PS Laurent Baumel, cité par Le Figaro, "l'urgent n'est pas le sociétal mais accélérer les décisions en faveur des couches populaires". La gauche n'a pas fini de chercher sa voie.

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