EN IMAGES. 20 ans de Festival d'Avignon par son photographe Christophe Raynaud de Lage
Rencontre avec Christophe Raynaud de Lage, photographe du Festival d'Avignon depuis 2005, à qui une exposition est consacré à la Maison Jean Vilar ("L'oeil présent", jusqu'en mars 2023). Pour nous, il résume 20 ans de festival en 12 photos.
Il capte le souffle et l’âme du plus grand festival de théâtre du monde depuis 2005. Une quête de "l’instant suspendu", comme il aime à le dire. Et aussi un marathon quotidien de 6 spectacles, soit 20 000 photos par éditions ! Le photographe Christophe Raynaud de Lage participe à écrire l’histoire du Festival d’Avignon. Signe qui ne trompe pas, la BNF a acquis cette mémoire photographique en décembre 2021, et chaque année une sélection de 2000 photos viendra compléter ce trésor. Christophe Raynaud de Lage expose son travail à la Maison Jean Vilar jusqu’au 26 juillet : L’œil présent. Il nous commente une sélection de moments qui l’ont particulièrement marqué.

Les photos qui me touchent le plus sont celles où je suis le plus proche des artistes. Les coulisses sont toujours des moments de bonheur pour moi. Là, le comédien Eric Challier m'accorde sa confiance car c’est juste avant d’entrer sur le plateau. Il a une pression et il m’accepte, je suis à 40 cm de lui. C’est lui qui plus tard va manger ses enfants sans le savoir. Il est sous la scène, il va traverser cette membrane. J'ai rampé pour atteindre l'endroit, on attend. On ressent toutes les vibrations du plateau, c’est un moment fort. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

A avignon, les performances tirent sur le rapport physique. Moi-même je m’engage physiquement. C’est peut-être ça qui fait qu’on a l’impression que les comédiens repoussent leurs limites. Et puis il y a les éléments qui perturbent : vent, pluie… Il faut que les comédiens les intègrent. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Ce qui fait le succès du festival ? Ce sont d'abord les lieux qui nous rassemblent. Il y a des endroits où c’est comme quand on entre dans une église, croyant ou pas, on est dans une écoute différente. C’est ce qui fait Avignon. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Il y a ces spectacles aux durées hors normes, le "Henri VI" de Thomas Jolly, Le Mahabharata de Peter Brook ou ici de Satoshi Miyagi. Dans toutes ces longues traversées quand je viens me placer près du public, je ressens beaucoup de bienveillance. On fait le voyage ensemble. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Ce spectacle m’a touché par sa force esthétique. Nous sommes dans le Palais des papes, le mistral aspire cette fumée dans un tourbillon unique. J’ai vu le spectacle trois fois, je n’ai jamais revu la même chose. On est au fond d’un tombeau, on s’envole, c’est quelque chose qui touche profondément. Ça me dépasse moi-même.
CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Quand on est dans un cloître, il y a 4 côtés, et pas uniquement le rapport frontal habituel dans un théâtre. Et du coup j’ai 4 possibilités. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Pour les comédiens il y a une rencontre particulière avec le public à Avignon, ça c’est sûr. Eux aussi forment un mur. Pour un artiste c’est quelque chose. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

C'est une photo d’Angélica Liddle dans un spectacle à la fois terrible et d’une grande beauté esthétique, avec toutes ces nudités de jeunes fille. Il fallait trouver la distanciation nécessaire pour quand même montrer ces images. J’ai décidé de travailler avec cette pose lente. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Photographier le festival, c’est le labeur, le défi de chaque année, je ne m’en lasse pas. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

L’excitation, c’est ça qui me tient. Je me couche tous les jours à 3 heures et demi du matin sinon je n’y arrive pas ! CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Je couvre 6 spectacles dans la journée, quand je rentre il faut que je fasse tout de suite la sauvegarde des 1000 images. Je fais une sélection et le festival en choisit une dizaine par spectacle., CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

J’avance au fur et à mesure. Je m’inscris dans un rapport mémoriel que j’ai voulu construire dès le début et j’aimerais continuer le plus que je pourrai à écrire cette histoire.
Christophe Raynaud de Lage