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« Margin call » : thriller de la crise financière

De J. C. Chandor (Etats-Unis), avec : Kevin Spacey, Paul Bettany, Jeremy Irons - 1h47 - Sortie : 2 mai
Article rédigé par franceinfo - Jacky Bornet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2 min
Demi Moore dans "Margin Call" de J. C. Chandlor
 (Arp Distribution)

Synopsis : Pour survivre à Wall Street :  soi être le premier, le meilleur ou tricher. La dernière nuit d’une équipe de traders, avant le crash de 2008. Pour sauver leur peau, un seul moyen : ruiner les autres…
 

Chronique d'un chaos annoncé
Ce n’est pas la première fois que le monde financier est un sujet de film et certainement pas la dernière. Pour preuve, le prochain Cronenberg attendu à Cannes, « Cosmopolis », identifie la crise financière à une apocalypse. « Margin Call » lui coupe quelque peu l’herbe sous le pied en exposant le processus de l’intérieur, tout en parvenant à faire des délibérations bureaucratiques le grain à moudre d’un thriller haletant.

C’est en effet un véritable thriller financier  qu’a réalisé J. C. Chandor, également signataire du scénario. Premier film : un coup de maître. Avec à la clé, un casting à la hauteur : Kevin Spacey, trop rare ces derniers temps, qui se rattrape dans une prestation magistrale, bien entouré, notamment de Paul Bettany, Jeremy Irons et Demi Moore.

En filigrane de « Margin Call », la faillite de la banque Lehman Brothers en 2008 qui stigmatisa l’ampleur de la crise financière, dont les répercussions se font toujours sentir.  Pas une seule fois le mot banque n’est prononcé, pas plus que son nom.

Kevin Spacey et Zachary Quinto dans "Margin Call" de J. C. Chandor
 (Arp Sélection)

Entité financière
Tous ses employés, du plus obscur trader au sommet ne parle que de « la firme ». Une abstraction qui prend comme une dimension métaphysique, dont les acteurs, enfermés dans leur tour de verre, sont comme des entités dépassés par des contingences impalpables. Leur hiérarchie, très soulignée, les identifie à des anges, archanges séraphins et Dieu, alors que le filmage joue de la profondeur de champ pour donner une véritable impression de vertige, de chute. Tous semblent à deux doigt de passer par la fenêtre. La métaphore déiste les identifie à des dieux de l’Olympe dépassés par leur propre création pour les mener au bord du précipice, à leur crépuscule, tout en se moquant des conséquences de leurs actes avec un cynisme désarmant.

Tous ne cessent de dire qu’ils ne comprennent pas, ni ne savent ce qu’ils font, comme dominés par des instances supérieures incontrôlables, alors qu’ils en sont à l’origine.  J. C. Chandor fait une démonstration remarquable, sans nous soûler de dialogues absconds (ou plutôt en les surlignant) et sans enfoncer des portes ouvertes, sur le velours d’une mise en scène feutrée qui n’est pas sans rappeler le David Fincher de « Social Network », mais en moins soûlant, justement. « Margin Call » s’avère d’une intelligence lumineuse à toutes les étapes de sa réalisation. Aller voir ce film mériterait d’être remboursé par la sécurité sociale. Mais son trou risquerait d’en être encore creusé.

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